Dans la nature, c'est parfois frustrant de ne pas pouvoir plus approcher la faune sauvage qui se méfie de l'homme et qui nous repère largement avant nous. Les centres de conversation de Sepilok permettent de compléter notre voyage dans la jungle car on peut en apprendre plus sur les animaux qui s'y cachent...

Aujourd'hui on prend la route pour Sepilok, c'est Joey et Afiq qui nous déposent tous au Sepilok B&B qui se trouve à un peu plus d'une heure de route de Kinabatangan. Sur la route, on voit les plantations de palmiers à perte de vue, la perspective est encore plus frappante lorsqu’on arrive en haut d'un col car on peut voir que les champs de palmiers s'étendent jusqu'à l'horizon.

Sepilok concentre plusieurs attractions à proximité de la ville de Sandakan, ce coin nous semble très agréable, les rues sont très propres et arborées, ici il y a plus de touristes et on retrouve certains de nos collègues de plongée de Mabul. A Sepilok, on peut visiter les sanctuaires de protection des animaux qui permettent de voir de plus près les animaux que l'on vu dans la nature à Kinabatangan, le plus connu de ces sanctuaires ouverts aux touristes est celui des orang-outan, à côté se trouve celui des sun bears, et à trente minutes de voiture celui des singes proboscis de Labuk bay. C'est pour cette raison que l'on a voulu passer par Sepilok, car dans la forêt c'est parfois frustrant de ne pas pouvoir s'approcher un peu plus, même si le fait de pouvoir découvrir les animaux dans leur habitat sauvage est vraiment une expérience forte, ici on va pouvoir prendre le temps d'en apprendre plus. C'est pourquoi à mon avis, c'est bien de faire la visite dans ce sens, d'abord à Kinabatangan puis à Sepilok et non l'inverse, sachant que l’un et l’autre ne sont pas très éloigné de l’aéroport de Sandakan, cela n’est pas très problématique dans la construction du voyage.

 

En début d'après-midi, on entre dans le parc des orang-utan où deux feeding sont prévus, un premier pour les jeunes singes à côté du réhabilitation center et un autre sur une plate-forme avec l'espoir d'attirer les animaux qui vivent dans la forêt et qui ont pris l’habitude de venir manger quelques bananes et légumes. On se rend d'abord dans le centre où le feeding va bientôt démarrer, il y a de nombreux orang-outan qui jouent là, autour de cordages et plate-forme de bois. Parmi eux, un gros spécimen vraiment costaud. Lors du feeding, c'est incroyable de voir leur attitude, tellement humaines, c'en est troublant. Or ce qui m'a plus frappé c'est leur forme d'égoïsme entre eux à celui qui pourra manger le plus, surtout de la part du plus costaud, qui ne partage pas et menace les autres. Comme si il n'était pas déjà assez gros et ne pouvait pas partager. Certains trouvent des subterfuges pour lui chiper quelques bananes en détournant son attention ou en se balançant depuis les cordes, ce qui a le don d'énerver beaucoup ce mâle dominant.

 

Après ce feeding au centre, on se rend à la plateforme de feeding dans la forêt. Des chemins ont été aménagés en hauteur autour de la plateforme pour s'installer, il y a beaucoup de monde qui attend déjà. Les humains ne sont pas les seuls, une large colonie de singe est là aussi en nombre et squatte la plate-forme. Aucun signe des orang-outan. On voit les gardes retarder l’heure du feeding, puis tentent de repousser un peu les singes mais sans résultat, les orang-outan ne viendront pas. Au grand plaisir des singes qui se délectent tranquillement. Alors que tout le monde est déjà parti, finalement un orang-outan solitaire arrive enfin. Mais les singes sont très nombreux, alors il n'ose pas s'approcher. On le voit s’approcher en se balançant de branche en branche, mais il s’avance avec précaution et jauge le rapport de force. Certains singes essayent de le provoquer et on va bien que ces deux espèces ne s'appécient pas trop. A première vue, il semble que les macaques ont peur des orang-outan mais c’est le nombre semble jouer en faveur des petits primates. Finalement, lorsque le plus gros groupe de singes s’en va il s’impose sur la plate-forme et cherche les restes à manger, on reste à le regarder. En partant de Sepilok on est un peu déçu car nous n'avons pas vu plus les orang-outan du feeding. En plus, je n'ai pas fait attention à l'argent qui restait et je suis presque à court de cash, et il n'y a pas d'ATM à Sepilok. Il reste quelques ringgits et il me faut trouver un moyen de retirer de l'argent, mais aucun taxi ne souhaite faire l’aller retour à l'ATM le plus proche. Je laisse tomber et j'organise la fin de la journée selon les conseils de Joey qui, avant de nous quitter à Sepilok, nous avait chaudement recommandé d'aller en fin de journée à Rainforest Discovery Center, à quelques minutes à pied du B&B pour y voir les écureuils volants et les tarsiers grâce à des night walks.

 

On arrive en avance à la forêt, on y rencontre un français qui fait le tour de Bornéo. On discute un moment et échangent quelques impressions de voyage, puis on repart sur les chemins de la forêt, en effet il reste encore bien une heure avant le départ du night walk et on décide de faire un premier tour du coin, en plus des passerelles ont été aménagées entre les arbres pour avoir la même perspective que les animaux. On marche sur les passerelles à la recherche des animaux mais pour le moment rien en vue. Il n'empêche ce point de vue est vraiment très intéressant et la promenade se révèle très agréable. On arrive quand même à apercevoir tout un groupe de hornbills dans les arbres, un peu loin. Il est bientôt l'heure de se retrouver au départ du night walk. On décide quand même de faire le tour du lac et là on tombe sur une magnifique surprise... Un orang-outan. Là. Juste en face de nous. A notre hauteur. Il ne nous a pas encore vu. Il est tout près. A deux mètres. Moment incroyable. Mais bref. Un Allemand arrive par l'autre côté, on fait des pas légers et dégaine l'appareil photo. Le singe grimpe sur une branche, et continue son ascension vers la cime des arbres, on profite de cette rencontre fortuite donc d'autant plus forte. Le fait de tomber nez à nez avec cet orang-outan en pleine nature, sans guide, sans feeding, rattrape et dépasse largement la frustration du centre de réhabilitation, on est fier de l'avoir vu nous-même.

 

On retourne à l'entrée pour rejoindre le groupe du night walk. Le groupe est très large et composé de toutes les nationalités et âges. Les guides nous amènent d'abord sur les passerelles pour voir les écureuils volants. Pour moi, l'écureuil volant est un animal qui me fascinait quand j'étais petit et abonné à des magazines pour enfants, je le trouvais tellement beau et gracieux. Je n'arrive pas à croire que l'on va en voir en vrai, mais le guide me certifie que les écureuils volants sont nombreux ici et la probabilité de les voir est très élevée. Et effectivement, on retrouve l'Allemand qui a vu l'orang-outan avec nous, il est là et a déjà aperçu un écureuil volant. L'écureuil se jette dans le vide et déploie ses "ailes" sous ses bras lui permettant de survoler la canopée jusqu'à s'accrocher à une autre branche. Incroyable de voir cela en vrai. On reste tous en silence sur la passerelle et on verra encore plusieurs autres écureuils volants.

 

Pour la suite du night walk, les guides nous séparent en plusieurs groupes. En petit comité maintenant on suit deux guides dans une longue marche dans la forêt humide, il fait encore chaud et humide, on transpire beaucoup. Parfois il faut accélérer le pas pour éviter les « fire ants » dont la morsure serait très douloureuse. On verra encore des choses très intéressantes et nouvelles dont un Loris paresseux qui se déplace très doucement sur sa branche. Par contre on ratera de peu un tarsier qui s'est échappé le temps que le guide nous l'indique. Joey avait raison, ce night walk est vraiment incroyable, même sans le tarsier, cela restera un des moments les plus forts du voyage. En rentrant au B&B, on se retrouve tous dans la salle commune pour diner.

 

Aujourd'hui, je dois déjà régler mon problème de cash. Je trouve enfin un taxi qui accepte de m'amener au distributeur puis au sanctuaire des singes proboscis de Labuk Bay. Malheureusement, arrivé à Sandakan, il y a une file d'attente devant l'ATM donc on décide de filer directement pour Labuk bay et de revenir après car le feeding est à 9h30. On a bien fait car on arrive à destination juste à l’heure du feeding de la journée. Le sanctuaire de Labuk Bay se trouve au milieu d'une plantation de palmiers, au bord de la mer au Nord de Sandakan, il est d'ailleurs géré par la compagnie propriétaire qui a conservé cette bande de terrain sauvage. Ici on peut approcher le singe proboscis de près, les animaux vivent librement dans cette forêt mais de la nourriture est disposée à proximité de plate-forme d'observation. Le singe proboscis est endémique de l'île de Bornéo, c'est une espèce fascinante qui a une gueule. Je trouve cet animal vraiment attachant avec ce nez proéminent chez les mâles. Ils ont aussi un cri très caractéristique d'ailleurs, très grave, que les rangers du parc arrivent à imiter à la perfection.

Encore une fois, après avoir pu observer les singes dans leur état complétement sauvage à Kinabatangan, c'est avec une autre perspective que l'on peut les approcher à Labuk Bay. Ces deux visites sont vraiment complémentaires.

Après le feeding, on reste à regarder les singes faire leur vie, c'est très rigolo de les voir, certaines de leurs mimiques sont troublantes tellement elles sont proches de celles des humains.

Un deuxième feeding est organisé en fin de matinée à la plateforme principale du sanctuaire à 1 kilomètre. Ici l'installation est plus grande et il y a beaucoup plus de monde. Un film est projeté en attendant le feeding, on en apprend plus sur les mœurs des singes, et je suis très content de découvrir certains détails que je ne connaissais pas.

Les singes arrivent en avance et investissent la plateforme, ils sautent avec vacarme sur les planches de bois. Un singe fait une sieste sur les marches de l'escalier. D'autres attendent un peu plus loin dans les arbres autour. Puis lorsque le feeding commence, les groupes de singe arrivent tous les uns après les autres. On ne peut pas dire que le partage se fasse dans l'harmonie, les groupes se bousculent et s'intimident pour prendre part au festin. Heureusement plusieurs plateformes de feeding ont été garnies. Il y a des singes partout, des mâles, des femelles, des bébés, ils sont tout autour de nous.

Après cette superbe escale à Labuk Bay on rentre manger sur Sepilok. Sur la route, alors qu’on est encore au sein de la plantation de palmiers propriétaire, je demande au chauffeur de taxi de s’arrêter, j’ai repéré un groupe de hornbill rhino juste sur le bord de la route. Puis un peu plus loin, des singes proboscis. Labuk Bay est vraiment un superbe endroit, même si c'est un peu loin de Sepilok, je recommande vraiment d'y faire un tour.

Cette fois pas le choix. Il faut retirer de l'argent. Le détour à Sandakan s'impose. La file d'attente n'est pas plus courte que ce matin, on patiente. Enfin de l’argent frais sort du distributeur. Ce problème réglé, on retourne à Sepilok. Après un repas à côté du centre de réhabilitation des sun bears, on va y faire un tour même si auparavant la description dans le guide ne m'avait pas inspiré. En fait c'est après avoir discuté avec une famille chinoise la veille juste avant le night walk à la forêt qui avaient été enchanté de ce qu'ils avaient vu que l'on avait décidé de nous y rendre. Et on a bien fait ! A l'entrée du centre il est noté (en chinois seulement, surement après un malentendu malheureux) que l'on ne peut pas demander le remboursement du ticket si on ne voit aucun ours, cela n'augure rien de bon, après la veille à Sepilok la chance ne semble pas être avec nous. Il faut savoir que le sun bear n'est pas une espèce endémique de Bornéo mais que l'on peut en trouver dans toute l'Asie du Sud Est, mais cette espèce est menacée et le centre récupère des animaux blessés ou capturés pour tenter de les ramener à la vie sauvage. On monte sur des plateformes pour voir la faune en contrebas et on ne tarde pas longtemps à tomber sur un ours qui dort dans un arbre. Puis un deuxième de l'autre côté. On a de la chance. Enfin, on voit les ours descendre des arbres car un feeding de noix de coco est organisé par l'équipe. On regarde donc ces gros mammifères finalement plutôt agiles qui descendent du tronc de cet arbre avec aisance.

 

Au loin, on entend des barrissements. Il s'agit d'éléphants qui ont été récupérés par le centre de protection des orang gutans, mais ils ne sont pas accessibles au public.

 

Sous nos pieds par contre les ours commencent à s'énerver, ça finit en bagarre générale avec cris et rugissements qui font froid dans le dos, ils se frappent et se pourchassent dans la forêt, les guides sont très inquiets et appellent leurs collègues pour calmer la situation.

 

Sur un arbre, une guide nous indique quelque chose. Mais on ne voit que le vert des feuilles. Elle montre de plus près en pointant quelque chose avec son doigt. Une vipère est posée sur une branche, immobile, sa peau a la même couleur verte vive que les feuillages. La guide nous explique que cela fait déjà quatre jours que la vipère est là, immobile, dans l'attente d'une potentielle proie qui viendrait à grimper le tronc. Quand on croit avoir tout vu, Bornéo nous réserve encore d'autres surprises !

Maintenant il est temps de partir de Sepilok pour prendre l'avion à Sandakan, une nouvelle page de ce voyage se tourne, Bornéo m'a déjà tellement comblé jusqu'ici, la diversité et la densité de la faune aura été bien au-delà de mes espérances.